Les Villards ! Cette petite vallée étroite s’ouvre sur la rive gauche de l’Arc, à hauteur de Saint-Etienne-de-Cuines. Elle correspond au territoire de deux communes – St-Alban et, plus haut, St-Colomban – et aboutit au célèbre col du Glandon, à 1924 m. d’altitude, point de passage vers l’Oisans et l’Isère d’une part, et vers la vallée des Arves d’autre part. Faiblement peuplés de nos jours, à peine 300 habitants au total, les deux chefs-lieux et la majorité de la quinzaine de hameaux ou villages s’adossent à l’endroit de la vallée, sur les contreforts du massif de Belledonne ; en face, sur l’envers, s’élève le massif Arvan-Villards. Entre les deux coule le torrent du Glandon qui prend sa source au-dessus du col du même nom pour se jeter dans l’Arc une vingtaine de kilomètres plus bas.
Le Vieux Savoyard grimpe au col du Glandon, situé à une dizaine de kilomètres du chef-lieu de St-Colomban. Sur les raides lacets, dont certains à plus de 10% de pente, des cyclistes travaillent du mollet, imitant les légendes de la Grande Boucle passées avant eux – de Fausto Coppi à Richard Virenque. Leurs efforts seront récompensés : depuis le col se dévoile un magnifique panorama couronné en toile de fond par le mont Blanc. Une stèle rappelle les durs combats livrés en ce lieu par les maquis de l’Oisans durant l’été 44. Du col partent deux routes : l’une monte vers le col de la Croix de Fer, à 2,5 km, point de passage vers la vallée des Arves et, plus bas, St-Jean-de-Maurienne ; l’autre descend vers la vallée de l’Eau d’Olle et le barrage de Grand’Maison, pour déboucher sur Vaujany, et, de là, rejoindre la Romanche. Des sentiers invitent à la randonnée vers les hauteurs minérales des lacs de la Croix, la cime du Sambuis ou les aiguilles de l’Argentière.
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Le col du Glandon ne marque pas la frontière entre la Savoie et le Dauphiné : St-Colomban s’étend sur l’autre versant du col, dans la vallée de l’Eau d’Olle jusqu’au barrage hydroélectrique de Grand-Maison, à la limite avec Vaujany, en Isère.
L’activité agricole se maintient, avec huit exploitations, ovines et bovines. Les Villards se trouvent dans la zone AOC Beaufort. Durant la saison d’estive, les alpages du Glandon accueillent des troupeaux de moutons venus de Provence. Les premiers sont arrivés dans les années 50, à mesure que déclinait l’agriculture locale.
La fréquentation du col du Glandon doit beaucoup à la publicité qu’en a fait le Tour de France : il a été franchi à 15 reprises depuis 1947. Certes partie intégrante du domaine des Sybelles, le 4e domaine le plus vaste de France, la station de ski souffre, quant à elle, d’un déficit de notoriété. Elle est pourtant la plus rapide d’accès, depuis l’autoroute de toute la Maurienne : à peine 10 km ! Elle s’étend sur 45 kilomètres de pistes au départ du hameau de La Pierre (1150 m) pour culminer au passage du col de Bellard (2233 m), entre les cols du Glandon et de la Croix de Fer.
Comme bien des vallées alpines, les Villards ont été durant des siècles une terre d’émigration. Pierre Bozon, un enfant du pays devenu professeur d’université à St-Etienne, en a fait l’histoire dans son livre de référence sur la vallée des Villards paru en 1970. Pour résumer, dès la fin septembre, la quasi-totalité de la population mâle, adultes et jeunes confondus, partaient se faire colporteurs, ramoneurs, peigneurs de chanvre… Ils allaient dans le Lyonnais, en Dauphiné, en Bourgogne, en Provence, et jusque dans le Sud-Ouest, et revenaient au printemps, au moment des semailles. Les colporteurs portaient sur leur dos une balle, une lourde caisse en bois contenant leurs marchandises : articles de mercerie, bibelot, miroirs, almanachs, tissus… Les ramoneurs, quant à eux, enrôlaient souvent des enfants très jeunes. C’était autant de bouches en moins à nourrir durant les longs hivers.
On peine à l’imaginer, mais St-Colomban et St-Alban étaient jadis très peuplées : 3287 habitants à elle deux en 1848, soit autant que St-Jean-de-Maurienne ! Cette activité saisonnière fondait la prospérité de cette population de montagne ; sans elles, elle n’aurait eu pour seule ressource que les maigres revenus de l’élevage. Mais durant le dernier tiers du XIXe s., cette émigration saisonnière est devenue définitive. D’abord limité, le dépeuplement s’est considérablement amplifié après la Première guerre – qui a coûté la vie à 116 hommes, soit le 1/3 des mobilisés. La fin du colportage traditionnel, l’exemple de la réussite des émigrés de la première heure, les difficultés de l’agriculture de montagne… ont poussé de plus en plus de Villarins à partir. Les Villarins se sont faits commerçants, ouvriers, laitiers, sont entrés dans l’administration, La Poste ou les chemins de fer. Privée de sa principale source de revenus, l’économie locale a décliné. La vallée s’est appauvrie, les alpages ont été abandonnés, entraînant, dans un cercle vicieux, un exode encore plus massif. Un chiffre en témoigne : de 1911 à 1968, la population a chuté de 1622 à 413 habitants…
Les noms composés abondent dans la vallée des Villards
L’ajout d’un second nom s’est fait au fil du temps pour différencier les familles. Il faisait référence à un trait de caractère, un lieu-dit, un métier, un terme patois. Le patronyme Paret a ainsi évolué en Paret-Peintre, Paret-Dodon, Paret-Mettaz… Les Paret-Dauphin, attestés dès 1670, viennent d’un aïeul colporteur dans le Dauphiné voisin. Idem avec les Favre : vous trouverez des Favre-Bonté, des Favre-Alliance, des Favre-Novel… L’immense majorité de ces patronymes sont spécifiques aux Villards. Grâce à quoi vous pouvez immédiatement repérer une famille d’origine villarinche partout en France !
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